mercredi 12 mars 2008

Premier mouvement

L'op.110 n'a pas de "petit nom".Originellement dédicacée à Antonia Brentano ( qui n'est autre que le dédicataire des Diabelli ), mais finalement parue sans dédicace, cette sonate est la plus caractéristique de cette fameuse troisième période: forme très libre, ampleur (phénoménale) des développements, un motif initial quidonne naissance aux différents thèmes (procédé dit "cyclique" ) , récitatifs, et , très important, reprise du fugato dans le dernier mouvement! Beethov a composé toute sa vie pour se dire finalement que Bach avant lui avait tout compris ! (mais on en reparlera plus tard).
Le premier mouvement peut être qualifié de "charmant" (sans aucun sous-entendu péjoratif). Il s'agit d'un Moderato Cantabile Molto Espressivo (entendez par là, Moderato chantant et très expressif). Quatre mesures introductives, tel un léger quatuor à cordes, annotées con amabilità (aimable) forment la première annonce thématique. Puis après une courte cadence se détache un second thème, pure ligne mélodique, d'une simplicité et d'une beauté admirables et touchantes, tel un chant au violon se détachant sur des batteries de doubles-croches ( violoncelles et altos?), le tout étant indiqué dolce. Douce et lumineuse, cette mélodie semble venir d'ailleurs, elle aspire à la sérénité d'une belle après-midi d'automne ensoleillée bien que pas très chaude.Les arpèges de triples croches qui suivent ne permettent pas de dégager un nouveau thème, ce ne sont que de petites perturbations (leggiermente) , légère brise qui détache quelques feuilles, gagne un peu en intensité, et stoppe nette (piano subito), laissant apparaître un monde comme en suspens, revenu (trop) soudainement au calme.
Une série de trilles à la main gauche amène progressivement un nouveau thème, d'un forte très ample , ampleur sonore mais aussi "harmonique" ( mouvement descendant pour les battteries main gauche, mouvement ascendantet lyrique main droite). Puis les deux mains se retrouvent afin d'achever cette exposition, assez étrange de forme car hétérogène.
Le développement est introduit ( ou, l'exposition est terminée ) par deux mesures où le temps semble arrété, simplification de l'harmonie réduite à un seul degré, pour retrouver notre tout premier thème (celui énoncé par le quatuor à cordes), répété 6 fois, permettant une évolution harmonique et un développement de la main gauche ( batteries, puis guirlandes de doubles legato, enfin triples, puis thème main gauche et triples main droite). Le second thème revient à la quarte supérieure et amène une modulation (mi majeur) pour les arpèges de triples.La réapparition du ton principal est brusque ( je ne dirais pas maladroite, car on parle de Beethov tout de même). Ainsi nous arrivons à la réexposition semble néanmoins plus lyrique avec des phrasés plus importants, et aboutit à quatre mesures d'accords syncopés qui atteignent tout de même le triple pianissimo, pour lancer une coda qui culmine sur un accord de sixte, en mineur, forte, qui semble être la seule touche "grave" de ce premier mouvement, "semble poser une larme sur le doux apaisemen final".....

Beethoven et l'op 110

Bonjour à tous! Pour inaugurer ce blog, parlons un peu de ce cher Op 110 de Beethov qui me tient tant à coeur (d'où mon adresse )....

Il s'agit donc de l'avant dernière sonate de Beethoven, le vieux Beethov, alors âgé de 51 ans (nous sommes donc en 1821)... On la dit la plus caractéristique de la troisième et dernière période de Beethov. Trois périodes chez Beethov? Oui, trois....les premières sonates, hommages à son grand Maestro Haydn, sont une parfaite vitrine de la première période, jusqu'à la fameuse op 27 n°2 dite "Clair de lune", qui voit apparaître la seconde forme, où Beethov se libère peu à peu des exigences classiques pour entrer dans une période pré-romantique, où l'expression des sentiments prend toute son ampleur. Nous sommes alors en 1802, et Beethov connait une grande déception sentimentale, et ressent les premiers signes de sa future célèbre surdité. Il est au bord du désespoir, l'idée du suicide lui traverse l'esprit, sa solitude est croissante, alors il compose énormément, s'acharne au travail. Cet esprit marque sa seconde partie, et grand nombre de ses sonates....
La dernière période correspond au groupe couramment dit des "trois dernières sonates" (op 109 à 111 ). Nous sommes en 1820, Beethov semble comprendre que se battre contre la mort est vain, qu'il est préférable de profiter de la vie ... les premiers mouvements des op 109 et 110 sont donc marqués par un espoir, une presque joie, dans une forme extrêmement libre. Parallèlement , Beethov compose la Missa solemnis, son testament spirituel.... les sonates reflètent son état d'esprit pendant la composition de messe, comme une immense sérénité face à la fin.
Ainsi en 1821, soit six ans avant son décès, Beethov compose simultanément l'op 110 et l'op 111.
(à suivre)